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Newsletter #6 - Novembre 2014

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MaddMaths
Edito

L'équipe MADD-Maths vous souhaite à tous une bonne rentrée !

Cet été, des événements importants ont animé l'actualité des Mathématiques. En effet, durant le mois d'août, des mathématiciens du monde entier se sont rassemblés à Séoul (en Corée du sud) à l'occasion du 27ème Congrès International des Mathématiciens. Comme les Jeux olympiques, cet événement se déroule tous les quatre ans dans un pays différent.

C'est à cette occasion qu'est décernée la plus importante distinction pour les mathématiciens : la médaille Fields ! Elle est l'équivalent du prix Nobel pour les mathématiques et récompense les résultats obtenus par des chercheurs de moins de 40 ans. Les lauréats de cette année sont Artur Avila (franco-brésilien, spécialiste des systèmes dynamiques), Manjul Bhargava (canado-américain d'origine indienne, qui travaille en théorie des nombres), Martin Hairer (autrichien, probabiliste), et Maryam Mirzakhani (iranienne, spécialiste de théorie ergodique et géométrie hyperbolique). C'est la première fois, depuis la création de la médaille Fields en 1936, qu'une femme est ainsi récompensée. Le fait que depuis 2002, il y ait toujours eu un français parmi les chercheurs récompensés et que la France occupe la deuxième place dans le classement général par pays illustre la dynamique et l'excellence des mathématiques françaises. Il ne manque plus qu'une médaille pour rattraper les Etats-Unis... Alors entraînez-vous bien, on a besoin de vous !



L'équipe de rédaction de la lettre MADD Maths.



Vie de Mathématicien : Vincent Verneuil

verneuil Que font les mathématiciens ? Vincent Verneuil s'exprime sur le sujet à travers une interview que nous lui avons proposée. Il est analyste en sécurité chez NXP Semiconductors, à Hambourg.

  • D'où vient votre passion pour les mathématiques ? Et pourquoi avez-vous décidé d'étudier les mathématiques ?

    Les mathématiques m’ont attiré depuis les premiers cours de géométrie à l’école primaire parce qu’il s’agissait de la seule matière qui repose uniquement sur la logique. Et pour moi les problèmes logiques ont toujours été ludiques, un peu comme les jeux de Picsou magazine… Il n’y a que la forme qui soit différente ! J’aimais aussi les autres matières comme le français, l’histoire, etc., mais ce n’était pas aussi amusant que les maths.

  • Est-ce que vous pouvez nous parler de votre parcours scolaire/universitaire ?

    À l’école primaire, j’ai eu des instituteurs passionnés qui m’ont donné envie de devenir professeur des écoles. Ce projet m’a suivi jusqu’à la fin du lycée. Il faut dire que mes parents n’ont jamais tenté d’influencer mes choix ou de m’orienter vers une autre voie. Ainsi je n’avais pas la pression que beaucoup d’enfants subissent aujourd’hui, me semble-t-il. J’ai récolté de bonnes notes sans trop me soucier de l’avenir et me suis inscrit à l’université pour étudier les mathématiques plutôt que dans une prépa prestigieuse comme l’auraient souhaité certains de mes professeurs. C’est à l’université que j’ai eu des doutes sur ma vocation d’instituteur. J’ai aussi lu un livre sur l’histoire de la cryptographie qui m’a passionné (L'histoire des codes secrets de Simon Singh) et j’ai découvert qu’il existait un master de cryptologie dans mon université. Si mes souvenirs sont exacts, je m’y suis inscrit sans trop me soucier des débouchés professionnels...

  • Avez-vous eu envie de poursuivre vos études universitaires par une thèse ? Est-ce que vous vouliez continuer votre carrière dans l'université ?

    À l’issue du master, je n’avais pas pour projet de faire une thèse. Je souhaitais avant tout travailler et prendre mon indépendance, ce qui pour moi était en contradiction avec l’idée de rester étudiant… Mon stage de fin de master m’a emmené en région parisienne, ce qui m’a fait sortir de ma « bulle » bordelaise. J’ai eu l’intuition que mes études n’étaient pas encore terminées et je me suis inscrit dans le mastère spécialisé (c’est-à-dire un bac +6) « Sécurité de l’information et des systèmes » de l’ESIEA à Paris. C’est là que l’on m’a expliqué qu’une thèse pouvait se dérouler en entreprise et ce compromis m’a tout de suite attiré. Faire carrière à l’université n’a jamais été mon projet, bien qu’aujourd’hui j’y pense quelquefois. Malheureusement les passerelles entre le monde industriel et le monde académique sont à ma connaissance trop limitées.

  • Comment êtes-vous entré dans le monde industriel ?

    Mon stage de mastère spécialisé s’est déroulé en région bordelaise dans le service validant la sécurité des produits cryptographiques chez Oberthur Technologies. Il était prévu que le stage soit suivi d’une thèse CIFRE, ce qui n’a pas pu se faire en raison d’un gel des recrutements au niveau national (nous étions alors en 2008). J’ai donc postulé à différents postes dans le domaine de la cryptographie embarquée sur carte à puce et j’ai décroché une autre thèse CIFRE à Inside Secure à Aix-en-Provence sur un sujet proche de mon sujet de stage : l’implémentation de la cryptographie à base de courbes elliptiques sur carte à puce.

  • Pourquoi avez-vous choisi cette carrière ?

    Je n’ai pas le sentiment d’avoir consciemment « choisi » cette carrière plutôt qu’une autre. Je n’ai fait que suivre mes centres d’intérêts. J’ai le sentiment d’avoir eu beaucoup de chance car ceux-ci m’ont porté vers un domaine où l’on trouve facilement du travail.

  • Que faites-vous actuellement (plus en détail) ?

    Après la fin de ma thèse, j’ai continué à travailler quelque temps chez Inside, puis j’ai eu envie de vivre une expérience à l’étranger, ce que je n’avais pas eu l’occasion de faire pendant mes études. Je dois dire que ma compagne m’a encouragé dans cette voie, ce qui a été très important pour franchir le pas. J’ai donc postulé pour un poste à Hambourg dans l’équipe d’analyse de vulnérabilité chez NXP. Dans cette équipe, nous jouons le rôle de « hackers » afin de mettre à l’épreuve la sécurité des composants (destinés à être embarqués sur des cartes bancaires, dans des passeports ou encore des boîtiers de télévision à péages). Je continue donc d’appliquer les attaques dites « par canaux auxiliaires » que j’ai étudiées pendant ma thèse sur des produits avant qu’ils ne partent dans des laboratoires de certification. Ces attaques consistent par exemple à étudier la consommation de courant d’un processeur pendant qu’il effectue une opération de cryptographie afin de s’assurer qu’elle ne divulgue pas d’information sur la clef secrète utilisée.

  • Est-ce que vous êtes satisfait de votre choix ?

    Je suis très satisfait de mon poste actuel. Bien que la recherche ne soit pas mon activité principale, j’en reste très proche car nous devons rester constamment à « l’état de l’art » des attaques publiées. Nous sommes donc en lien direct avec le monde académique, ce qui est important pour moi. Je suis également très heureux à Hambourg. C’est une ville très agréable, à l’opposé de l’image austère que l’on en a parfois.

  • Quelle est l'importance des mathématiques dans votre métier ?

    Mon travail ne consiste pas à faire des mathématiques à proprement parler, pourtant je ne pourrais pas le faire correctement si je n’avais pas cette formation. Une des difficultés de notre mission de sécurisation des composants est que nous avons face à nous des attaquants qui n’ont qu’à « réussir une fois » pour contourner nos mesures de sécurité, alors que nous, nous devons « réussir toujours » pour protéger les produits contre les attaques. Dans ce contexte, le raisonnement mathématique est le seul qui puisse apporter une preuve de sécurité face à un adversaire que nous modélisons par des hypothèses (son degré de connaissance du produit, sa capacité à interagir avec le composant, etc.). Sans les mathématiques, nous ne ferions qu’appliquer des contre-mesures à l’aveugle pour parer telle ou telle attaque. En revanche, avec les mathématiques nous avons la capacité de concevoir des contre-mesures qui protègent les composants d’une large classe d’attaque. Lorsque toutes les classes d’attaques connues sont couvertes, on peut considérer le produit comme sécurisé.

  • Pouvez-vous décrire un projet dans lequel les mathématiques ont joué un rôle important ?

    Les mathématiques sont utiles dans deux domaines de mon métier : la cryptographie d'une part, car de nombreux algorithmes cryptographiques (en particulier dans le domaine de la cryptographie à clef publique) reposent sur la théorie des nombres et l’algèbre, et l’analyse des composants d'autre part, où une démarche mathématique est nécessaire pour garantir qu’une attaque est efficacement couverte. Cette tâche fait aussi appel à des connaissances en statistiques, traitement du signal, informatique, etc.

  • Est-ce que vous êtes satisfait de « l'application » de votre connaissance des mathématiques ?

    Comme je l’ai expliqué, mon métier fait appel à de nombreuses disciplines des mathématiques que j’ai étudiées pendant mon cursus universitaire. Mais le plus important reste à mon avis la démarche mathématique qui interdit de prendre pour acquis quelque chose que l’on n’a pas démontré. Les exemples d’échec dans le domaine de la cryptographie et de la sécurité sont nombreux lorsque ce principe n’est pas respecté !

  • Changeriez-vous quelque chose dans votre vie comme mathématicien ? Quels sont vos projets pour l'avenir ?

    Je ne me considère pas comme un mathématicien à proprement parler. Le métier que j’exerce fait appel aux mathématiques, mais aussi à l’informatique et à l’électronique par exemple. Je n’ai pas de projet précis pour l’avenir, je compte poursuivre ma découverte du champ des attaques sur composants embarqués. Je souhaite rester du côté technique de ce domaine : le management, très peu pour moi ! Une chose est sûre : si un jour je ne m’amuse plus dans mon métier ou que je cesse d’apprendre de nouvelles choses, c’est qu’il est temps pour moi de passer à autre chose.

  • Selon vous quelles sont les raisons qui font des mathématiques la matière scolaire la plus difficile et la plus redoutée ?

    Premièrement, l’aspect ludique des mathématiques que j’ai évoqué plus haut n’est probablement pas assez exploité ou mis en valeur à l’école ! Si l’on apprenait les maths au travers de « jeux » plutôt que de « problèmes », cela rebuterait peut-être moins les écoliers. Bien sûr, à partir d’un certain niveau, la capacité à raisonner sur des concepts abstraits constitue une barrière pour certains. C’est tout à fait normal : tout le monde n’a pas vocation à devenir mathématicien. Ensuite, il y a une tendance de fond dans notre société qui tend à dissocier l’amusement et la réflexion, le plaisir et l’effort. Pourtant si on leur accorde du temps et quelques efforts, les mathématiques apportent beaucoup de plaisir et peuvent être à la fois amusantes et très surprenantes. Je pense qu’il n’est pas juste de considérer les mathématiques - ainsi que les autres sciences fondamentales - comme trop difficiles.

  • Que conseilleriez-vous aux mathématiciens qui veulent entrer dans le domaine industriel ?

    Il faut bien sûr s’intéresser au monde industriel et aux problématiques qui peuvent trouver des solutions dans les mathématiques. Il y a beaucoup de travail dans les domaines de l’optimisation, de la modélisation, des statistiques, etc. Je pense aussi qu’il faut faire preuve de créativité et avoir l’esprit d’initiative car un industriel n’a pas nécessairement conscience que les mathématiques peuvent apporter une solution à ses problèmes. Ensuite il faut savoir que le monde industriel fonctionne différemment du monde académique. Pour autant que je puisse dire, l’un n’est pas meilleur que l’autre : chacun a ses avantages et ses inconvénients !


Le questionnaire de Proust : Aline Bonami, MAPMO

bonami Aline Bonami est professeur émérite à l'université d'Orléans. Elle a travaillé dans de nombreux domaines des mathématiques - analyse harmonique, analyse complexe, probabilités, équations aux dérivées partielles - en abolissant les frontières entre maths pures et appliquées, passant de l'analyse complexe à la détection de l'ostéoporose par exemple. Elle a représenté les mathématiciens dans de nombreuses institutions (CNU, CNRS, ministère, SMF). Tout au long de sa carrière, elle n'a cessé de s'intéresser à la recherche en mathématiques dans les pays en voie de développement.

  • Ma vertu préférée en mathématiques

    La curiosité.

  • Le principal trait de mon caractère mathématique

    L'éclectisme.

  • La qualité que je préfère chez les mathématiciens

    Leur honnêteté.

  • La qualité que je préfère en mathématiques

    L'imagination.

  • Mon principal défaut comme mathématicienne

    Le dilettantisme.

  • Ma lecture mathématique préférée

    À chaque moment la dernière en date, si du moins elle m’a plu. Actuellement le livre de Wiener, « La Cybernétique ».

  • Mon rêve comme mathématicienne / Mon cauchemar comme mathématicienne.

    Réussir à visualiser une longue et belle démonstration, avec plein de découpages / être engluée au milieu d’une démonstration sans rien y voir.

  • La faiblesse principale des mathématiques

    Leur éloignement des autres sciences, les difficultés de communication.

  • La mathématicienne que je voudrais être

    Que je voudrais être, ou pourrais être ? Mes modèles absolus sont Jean Bourgain et Terence Tao, qui ont une capacité d’imagination extraordinaire.

  • Le théorème que je préfère

    Le théorème de différentiation de Lebesgue.

  • L'application des mathématiques que je préfère

    Le traitement du signal : l’utilisation universelle du théorème d'échantillonnage, c’est quelque chose de fascinant...

  • Les mathématiciens qui m'ont orientée

    Yves Meyer, Jean-Pierre Kahane, et aussi Eli Stein et l’école américaine d’analyse réelle.

  • Les mathématiciens qui m'ont dissuadée

    Peut-être y en a-t-il eu d’autres que moi-même aux moments de doute, mais j’ai oublié.

  • Le nom de variable que je préfère

    Lambda, qu’on utilise pour décrire le spectre d’une série trigonométrique lacunaire.

  • Le type de calcul que je préfère

    J’aime découper les intégrales en petits morceaux pour pouvoir les estimer. J’aime qu’il y ait besoin d'arguments combinatoires pour arriver à organiser les calculs.

  • Le type de calcul que j'utilise

    L'analyse de Fourier et différentes techniques d'analyse réelle.

  • Le type de calcul que je trouve le plus ennuyeux

    Les calculs explicites lorsqu’on n’arrive pas à les ordonner pour pouvoir les comprendre.

  • Les dénominations mathématiques que je préfère (théorème, corollaire...)

    Lemme : les petits lemmes, ce sont les briques des démonstrations.

  • L'entreprise scientifique que j'estime le plus

    Je suis fascinée par les commencements, les premières inventions. Celles qui n’étaient pas formalisées comme telles, l’invention des machines-outils, de la brouette…

  • Le don de la nature que je voudrais avoir.

    Un don qu’on perd avec l’âge, le don de dormir à la demande. Quand j’étais jeune j’avais besoin de beaucoup de sommeil. Comme les maths, à certains moments de la recherche, ont tendance à être obsédantes, elles m’empêchaient de dormir, ce que je ne supportais pas plus d’une nuit. Maintenant un bon sommeil m’est nécessaire pour pouvoir faire des maths le lendemain, et ce n’est pas gagné.

  • Comment j'aimerais qu'on se souvienne de moi comme mathématicienne

    Comme quelqu’un d’ouvert, qui n’hésite pas à prendre de son temps pour aider les autres. Et, accessoirement, comme l’auteur de quelques lemmes.

  • L'état présent de mes recherches

    Des chantiers dans beaucoup de directions, au gré des collaborations.

  • La faute qui m'inspire le plus d'indulgence

    Les erreurs de calcul, alors que j'ai peu d'indulgence pour les fautes de raisonnement, surtout les miennes.

  • Ma devise

    Me faire confiance, suivre mon intuition.

  • Pourquoi la recherche mathématique est-elle masculine ?

    La recherche n'est pas masculine par essence. Par contre, si on utilise un vocabulaire guerrier pour la décrire, ce qu’on fait couramment (on se bat avec un calcul, on attaque un problème…), elle le devient. J’ai beaucoup aimé le livre d’Isabelle Stengers « Une autre science est possible ! », dans lequel ces idées sont développées. Peut-être un jour valorisera-t-on les aspects collaboratifs de la recherche plus que la compétition entre chercheurs ? Il faut espérer, pour le bien des mathématiques elles-mêmes, que la communauté mathématique sera plus équilibrée du point de vue mixité, et aussi diversité. Il faut agir en ce sens.

  • Les mathématiques appliquées s'étendent-elles à la même vitesse que celle des algorithmes mathématiques ?

    Je ne comprends pas bien la question. Les mathématiciens appliqués ne trouvent évidemment pas des théorèmes d’existence ou de convergence dès qu’un bon algorithme a été trouvé, par un mathématicien ou quelqu’un d’autre : ingénieur, informaticien, mécanicien, physicien… Ce qui ne contredit pas le fait qu’il est important que les mathématiciens s’intéressent aux applications, même lorsque il n’y a pas de théorème en vue. Il y a eu beaucoup de progrès récents dans cette direction en France.

  • Dans quelle mesure le travail compte-t-il dans la résolution de problèmes mathématiques ?

    On peut avoir la nostalgie de la résolution de problèmes au lycée, où il suffisait d’avoir la bonne idée sans beaucoup travailler. En recherche il faut beaucoup de travail. Il faut par contre beaucoup de liberté dans sa manière de travailler. Il ne s’agit pas de s’asseoir à sa table et de lire ou écrire, il y a des jours où ça ne servirait à rien (du moins pour moi). On avance quand le problème est complètement entêtant et vous accompagne partout.

    La culture générale, qui s’acquiert au fil des ans, joue un rôle important. On ne l’acquiert pas sans travail, mais c’est un travail plus léger, désintéressé, au cours duquel on se laisse entraîner de lecture en lecture, de séminaire en séminaire. Malheureusement les contraintes actuelles n’aident pas les jeunes collègues à y consacrer du temps.

  • Dans quelle mesure le formalisme compte-t-il ?

    Le formalisme est inhérent aux mathématiques, il n’y a pas de mathématiques sans formalisme. Ceci dit, il vaut mieux qu’il reste léger et ne soit pas un carcan. En analyse harmonique, il y a 40 ans, beaucoup de résultats étaient écrits pour les groupes abéliens localement compacts généraux. C’était souvent un formalisme inutile, les vraies difficultés, ainsi que les applications, concernant les séries et intégrales de Fourier. Inversement le recours à un formalisme adapté est évidemment souvent déterminant.

  • Mathématiques et grammaire sont-elles liées ?

    Je suis assez mal à l’aise avec cette idée de liens privilégiés entre les mathématiques et la musique, les mathématiques et la grammaire, etc., au-delà de ce que nous apprend l’histoire des sciences. Elle sous-tend souvent l’idée que le « don » pour les mathématiques s’accompagne automatiquement de dons pour un certain nombre de disciplines. Je ne le constate pas sur moi.

  • Parlez-vous "mathématique" correctement ?

    Aux autres d’en juger.

  • À quel point faut-il être douée pour réussir en mathématique ? Pourquoi faut-il avoir moins de trente ans ?

    C’est comme dans toute autre activité, il faut y réussir raisonnablement pour y trouver du goût. Inné ou acquis… quand on parle de don on pense bien évidemment à l’inné. Mais comme on dit pour d’autres identités, on ne naît pas mathématicien-ne, on le devient. Moins de 30 ans ? Bien entendu beaucoup de mathématiques se sont faites après 30 ans, 40 ans, voire 60 ans ou plus. Mais il me semble vrai qu’on a plus d’imagination avant 30 ans, plus de culture après. J’ai l’impression de m’être forgé le goût avant 30 ans, mais de m’être libérée après 50. « Si jeunesse savait, si vieillesse pouvait ».

  • Êtes-vous douée ? Depuis quand ?

    Est-ce vraiment une question à laquelle on peut répondre ? Dire non est absurde au regard de tous celles et ceux qui ont du mal avec les mathématiques, dire oui est outrecuidant, dire que le don s’acquiert n’a pas vraiment de sens. Il vaut bien mieux dire que le plaisir des maths reste entier, après des années.


Alphabet : F comme Fractale

Philippe GRILLOT - Université d'Orléans

Nous avons tous dans notre jeunesse été amenés à colorier un motif avec un crayon de couleur bien taillé en traçant des lignes brisées continues. Nous sommes-nous donc interrogés sur le fait que notre motif pouvait être colorié complètement à l'aide d'une ligne brisée infinie ?


flocon Une figure fractale, terme introduit par Benoît Mandelbrot en 1974, est une courbe ou une surface de forme irrégulière. Chaque fractale possède un motif élémentaire qui se répète une infinité de fois à différentes échelles, ce que l'on nomme principe d'auto-similarité. Ainsi, en observant une fractale avec des loupes de plus en plus grossissantes, on observerait des motifs dont les formes seraient similaires. Par exemple le Flocon de Von Koch ci-dessus.


Fruit de l'imagination des mathématiciens, ces objets peuvent aussi se rencontrer dans la nature, par exemple : choux, feuilles de fougères, cratères de la lune, ...


fougere Les mathématiciens ont également trouvé des propriétés spécifiques dues à la forme très irrégulière d'objets fractals. Par exemple les murs anti-bruits, les antennes des téléphones portables, les animations numériques des films et jeux vidéo, la création d'objets d'art, ... Pour vous convaincre encore plus que les objets fractals sont présents dans votre quotidien et aussi dans l'imaginaire artistique, nous vous proposons de visionner le film : À la recherche de la dimension cachée.


Pour aller plus loin, vous pouvez aller voir les chapitres 5 et 6 du film Dimensions.


Un modèle mathématique capable de prédire le niveau de glucose dans le sang

globules_rouges Certains chercheurs ont créé un modèle mathématique capable de prédire avec précision le niveau de glucose dans le sang chez les personnes diabétiques, obtenant ainsi de meilleurs résultats qu'avec les appareils habituels.


Le résultat de la recherche, menée par une équipe de scientifiques de Penn State aux États-Unis, semble être un simple calcul mathématique, mais en réalité, il est beaucoup plus. Le modèle mathématique proposé fournit en effet des résultats plus précis que les appareils actuellement utilisés pour mesurer le niveau de sucre dans le sang. En outre, ce modèle est capable de prédire le niveau de glucose dans le sang jusqu'à trente minutes à l'avance, un intervalle de temps suffisamment long pour pouvoir éventuellement intervenir.


La recherche, financée par les Instituts américains de la santé (NIH), la Fondation nationale pour la science (NSF) et l'université de Penn State, est basée sur des données relatives aux patients atteints de diabète de type 1.


Le modèle fournit des résultats plus précis que les appareils

« Beaucoup de personnes atteintes de diabète de type 1 surveillent continuellement leur taux de glucose avec des appareils », explique le professeur de psychologie Peter Molenaar. Mais cela permet une prédiction du niveau de glucose entre 8 et 15 minutes, ce temps n’est pas toujours suffisant pour intervenir avec une dose appropriée d'insuline. Comme Molenaar le souligne, « les patients peuvent tomber en hypoglycémie avant que l’appareil ne les prévienne », ce qui peut entraîner la mort.


Le professeur Molenaar explique que le niveau de glucose dans le sang d'une personne fluctue en fonction de la réponse à une certaine dose d'insuline, de l’activité physique et même de l'état émotionnel. Le niveau des fluctuations dépend bien entendu des personnes.


« Au cours de la dernière décennie, il y a eu de nombreuses avancées dans le développement d'un "pancréas artificiel" mécanique ; ce serait un système qui délivre de l’insuline et facilement transportable, se composant d'un moniteur de glucose, d’une pompe à insuline et d’un algorithme de contrôle, explique Molenaar. La création d'un pancréas artificiel qui fournit la bonne quantité d'insuline au bon moment a été un défi, car il est difficile de créer un algorithme de contrôle capable de gérer la variabilité entre les individus. Notre nouveau modèle est en mesure d'examiner cette variabilité. Il prédit le niveau de glucose dans le sang des individus en fonction de la dose d'insuline et du moment des repas ».


Qian Wang, professeur de génie mécanique et co-auteur de l'étude, a déclaré que « les dépendances dynamiques de la glycémie, la dose d'insuline et la prise de repas varient considérablement au fil du temps, pour chaque patient et entre les patients. La prédiction de haute fidélité de notre modèle sur des intervalles de 30 minutes permet l'exécution de la commande optimale de la dose d'insuline à action rapide et en temps réel, parce que l'ouverture de l'insuline a un retard de moins de 30 minutes. Notre approche permet de surpasser les standards parce que tous les paramètres de notre modèle sont estimés en temps réel. La configuration de notre modèle et le contrôleur optimal constitueront un pancréas artificiel efficace ».


Les mathématiques de l'amour

Lors d'une conférence TEDx organisée à Binghamton dans l'État de New York aux États-Unis, la mathématicienne britannique Hannah Fry a donné des conseils "mathématiques" pour réussir en amour.


maths_love Hannah Fry, chercheuse au « Centre for Advanced Spatial Analysis » de l'University College à Londres, a pris la scène du TEDx organisé à l'Université de Binghamton pour partager sa passion pour les mathématiques en concentrant son exposé sur les mathématiques de l'amour, c'est-à-dire la façon d'appliquer les mathématiques à des questions de cœur. En effet, selon H. Fry, le succès des mathématiciens en amour est dû non seulement à leur personnalité pétillante et leur conversation brillante, mais aussi à plusieurs études sur la façon de trouver le compagnon ou la compagne idéal(e).


Sa première référence "scientifique" sur le lien entre les mathématiques et l'amour est l'article de Peter Backus « Pourquoi je n'ai pas de petite amie ? ». Dans ce travail, l'équation de Drake - utilisée précédemment pour estimer le nombre de civilisations hautement évoluées qui peuvent exister dans la Voie Lactée - permet de calculer le nombre de compagnes potentielles. M. Backus a constaté que parmi 30 millions de femmes environ dans le Royaume-Uni, seulement 26 étaient des compagnes potentielles. Ainsi, dans une soirée passée à Londres, il y aurait une chance de 0.0000034% de rencontrer une femme qui correspondrait à ses goûts et qui, en retour, serait intéressée. Un peu faible, n'est-ce pas ?


0.0000034% de chance de rencontrer une femme qui correspondrait à ses goûts

Voici alors quelques conseils sur la façon d'augmenter ses chances. Le premier concerne les sites de rencontres en ligne ; parmi les différents sites, H. Fry s'est intéressée à OkCupid, car il a été créé par des mathématiciens qui ont ensuite analysé les données collectées. Lorsque nous créons un profil, la chose la plus importante est l'honnêteté ; en fait, il semble que la popularité sur ces réseaux sociaux n'est pas directement proportionnelle à la beauté : même si nous ne sommes pas des Apollons, nous pouvons toujours tirer parti de nos points de faiblesse. En réalité, si beaucoup de gens pensent qu'une personne est attrayante, ces gens se disent aussi qu'il sera difficile de la conquérir. Hannah Fry a ajouté que la plupart des gens essaient de cacher leurs défauts, mais au contraire, nous devons montrer ce qui fait notre différence, même si nous pensons que certaines personnes ne nous trouveront pas attrayant, parce que les gens qui sont intéressés par nous continueront à l'être malgré tout et ceux qui ne le sont pas, ce n'est pas la peine de les perdre.


conseils sur la façon d'augmenter ses chances

La deuxième suggestion concerne le bon moment pour s'engager dans une relation. Afin de maximiser les chances de trouver le compagnon idéal, nous devons appliquer la théorie de l'arrêt optimal. En admettant que, généralement, les premiers amours arrivent à 15 ans et que vers 35 nous voudrions être casés, la stratégie gagnante est de rejeter tous les compagnons rencontrés au cours de la première tranche de 37% de cette période de temps, et de choisir comme compagnon de vie la première personne que nous rencontrons qui est mieux de ses prédécesseurs. Mme Fry a ajouté que dans la nature, par exemple, il y a certains types de poissons qui suivent cette stratégie. Ils rejettent tous les poissons qui arrivent pendant le premier tiers de la saison d'accouplement, puis ils acceptent le premier poisson qui est plus grand que tous les précédents.


Enfin la dernière suggestion de H. Fry concerne comment éviter un divorce. John Gottman est un psychologue qui, en étudiant différentes variables dans les relations de couple, a été en mesure de déterminer avec une précision de 90% les couples stables et ceux proches du divorce. Grâce à la collaboration avec le mathématicien James Murray, il a ensuite proposé un modèle d'équations différentielles ordinaires pour étudier la dynamique du mariage. Le résultat a été que les couples ayant une relation plus stable ne sont pas les plus compréhensifs ni les plus tolérants, mais ceux qui sont le plus susceptibles de dire si quelque chose les dérange. Cette typologie de couple essaie constamment d'améliorer sa relation et d'avoir une vision plus positive sur le mariage.


Hannah Fry a conclu en disant qu'elle espérait que la compréhension des mathématiques de l'amour puisse amener à avoir un peu plus d'amour pour les mathématiques.



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