Le groupe MAS


``Mathématiques Appliquées et Industrielles'' signifient bien sûr modélisation mathématique de phénomènes réels, le plus souvent observés au moyen de dispositifs de mesure, qu'il s'agisse de capteurs de températures ou de pression dans des écoulements fluides ou qu'il s'agisse, par exemple, de plans d'échantillonnage dans l'étude de comportements humains ou animaux. Très souvent une théorie - parfois fort complexe - décrit le comportement moyen du phénomène étudié. On débouche alors sur des équations différentielles ou des EDP - c\oeur peut-être des Maths Appli, et des Sociétés Savantes concernées par celles-ci.

Mais un statisticien reste toujours un rien décontenancé par le fait que l'on décrète souvent - au moins dans les faits - que toute fluctuation aléatoire autour de ce comportement moyen est négligeable. Sans doute est-ce naturel quand on considère un fluide décrit à l'échelle du nombre d'Avogadro. Mais sans doute ne l'est-ce pas quand on décrit des populations de centaines d'individus (voire moins), ni quand on traite non pas la température en chaque point d'un fuselage mais une mesure de celle-ci.

Les modèles aléatoires et les statistiques destinées à les traiter, sont donc omniprésentes dans les applications des mathématiques. Or, si une telle modélisation vient en premier à l'esprit quand on parle de traitement de signal, de mathématiques financières ou d'épidémiologie, c'est parfois moins immédiat en analyse d'image ou en météorologie, et c'est (encore ?) minoritaire dans certaines branches de l'optimisation de formes, du calcul de structures ou de phénomènes magnétiques régis par des EDP - l'approche théorique des EDP stochastique est d'ailleurs loin d'être achevée.

Il est donc naturel qu'une partie des adhérents de la SMAI consacrent leurs recherches aux probabilités appliquées et aux statistiques... et se réunissent dans le groupe MAS (Modélisation Aléatoire et Statistique).

Ce groupe se retrouve - mais ce n'est pas spécifique - à la croisée de communautés assez différenciées. Pour s'exprimer comme le ferait un Statisticien face à une ACP, on distingue un premier axe ``Probabilités-Statistiques'', qui vient des probabilités les plus abstraites, et au delà de la Théorie de la Mesure et de l'Analyse Pure - branches de la Mathématique classique en ce qu'elle déduit des théorèmes en partant d'hypothèses que nul ne songe à remettre en cause. De l'autre côté, cet axe va vers la Statistique qui se distingue par la considération simultanée de plusieurs lois et par le retournement du discours déductif en un discours inductif, qui ``remonte des conséquences aux causes, des ``observations'' aux lois''. L'expérience montre d'ailleurs que rares sont les Mathématiciens qui soupçonnent cette démarche propre au statisticien.

Un second axe - qui n'est peut être pas orthogonal au précédent - traverse le groupe MAS : il va de théoriciens, ``statisticiens mathématiques'' pour qui les ``observations'' X1, X2, ... Xn ne sont finalement que des êtres mathématiques comme les autres, et se prolonge jusqu'au praticien qui s'attache aux résultats dans une discipline extra-mathématique bien plus qu'à la rigueur des démonstration ou à la recherche d'hypothèses minimales. Peut-être - sans doute - ces deux extrêmes sont loin de part et d'autre des membres du groupe MAS, mais ceux-ci pourront se sentir plus ou moins proches de ces deux extrêmes. Et - paradoxalement - cette diversité, cette richesse dans les points de vue, va détourner de notre groupe certains collègues, soit qu'ils aient peur d'y perdre leur qualité de mathématicien pur (c'est, parait-il le terme), soit qu'ils trouvent trop pesant le poids de la statistique universitaire.

Mais définir les frontières d'un domaine, c'est définir ce domaine. Au delà des frontières du Groupe MAS existent d'autres communautés, d'autres centres de regroupement, tout aussi respectables que le nôtre, des Sociétés de Mathématique ou des Sociétés de Statistique avec lesquelles nous devons échanger nos problématiques et nos compétences.

Car c'est de la définition de cette niche écologique que sont nés la SMAI et le Groupe MAS : certains collègues ne se retrouvaient pas totalement dans le paysage des Sociétés Savantes d'alors. La SMAI a vingt ans, le Groupe MAS en a douze. Son Père fut Jacques Neveu, un Probabiliste, exceptionnel représentant de l'École française de mathématique, qui a emboité le pas aux fondateurs de la SMAI qui trouvaient que notre pays négligeait les ``Maths Applis''. Le credo du groupe fut - et reste : ``promouvoir, en particulier auprès des entreprises, les méthodes de la statistique et des probabilités appliquées''.

Ses présidents furent parfois probabilistes et parfois statisticiens - sans que rien de statutaire ne l'impose : à Jacques Neveu a succédé Pascal Massart, puis François Baccelli et, jusqu'en septembre dernier, Denis Talay. Je ne peux citer tous les membres des bureaux successifs, ils sont trop nombreux - je n'évoquerai que le travail de notre trésorière, Marie Cottrel.

Peu à peu défini une ligne de politique scientifique pour notre Groupe est sortie des réunions de bureaux, des discussions lors des Assemblées Générales du Groupe, des échanges entre membres du MAS lors de Congrès, mais aussi des réunions formelles ou informelles avec le reste de la SMAI, avec l'ASU puis la SFdS ou avec des collègues étrangers. Et, au sein de la SMAI, MAS est devenu un interlocuteur reconnu de nos tutelles, Ministère ou CNRS.

Bien avant que les revues Esaim n'existent, le bureau MAS les a révées. Il me souvient de réunions où l'on jouait, émerveillés, à disposer d'un semblable outil : ``Quel gain de temps si l'on ne doit pas attendre que le `back-up` se vide - Oui, mais il en importe que davantage d'être attentif sur le niveau scientifique - Bien sûr, et l'on pourra même mettre en ligne des données ou des logiciels...''. Il a fallu attendre qu'une initiative du Ministère rencontre nos rèves pour voir naître Esaim P&S, frère jumeau d'Esaim COCV, mené dans ses premiers pas par Pascal Massart et Étienne Pardoux, avant que Patrick Cattiaux et Anestis Antoniadis ne prennent en main l'âge de la croissance.

Et, à côté des publications, une activité scientifique bien comprise développe des congrès. À ses débuts, notre Groupe s'est contenté d'organiser des sessions - par exemple aux ``Congrès de l'ASU'' devenus ensuites les ``Journées de Statistique'' de la SFdS. Puis le Groupe a osé se lancer seul, et ce furent les Journées MAS, Toulouse, Nice, Rennes, Grenoble, en attendant prochainement Nancy. Journées orientées vers le jeunes : ceux-ci constituent la majorité des conférenciers des sessions parallèles - c'est souvent l'occasion d'un première prise de parole dans un Congrès, facilité par l'usage permis du français. C'est aussi à eux que s'adressent en priorité les exposés, qualifiés de ``tutoriaux'', qui, au long des séances plénières suivent un fil rouge, thème choisi pour son intérêt général mais souvent nouveau pour bien des auditeurs.

À coté de ces deux gros chantiers, les membres du MAS ont apporté leurs contributions à d'autres publications ``SMAI'' : Matapli, bien sûr ou livres de la collection Mathématiques et Applications. Et le Groupe MAS a participé à d'autres colloques : congrès SMAI, Journées Industrielles du Groupe, etc...



2003-09-16